La Cour de cassation a récemment rendu une décision qui pourrait profondément modifier l’organisation du travail pour de nombreux salariés en France. En effet, dans un arrêt daté du 13 novembre, elle a jugé qu’il est légal pour un employeur de faire travailler un salarié jusqu’à 12 jours consécutifs, sous réserve de respecter les règles relatives au repos hebdomadaire. Cette décision clarifie une zone d’ombre dans le droit du travail, en précisant que le repos hebdomadaire doit être pris dans le cadre de la semaine civile, c’est-à-dire du lundi au dimanche.
Ce jugement intervient dans un contexte où la réglementation française impose normalement un repos d’au moins un jour par semaine, conformément à l’article L.3132-1 du Code du travail. Toutefois, avant cette décision, la nature exacte de cette “semaine” faisait débat, certains tribunaux considérant qu’il s’agissait de sept jours consécutifs, alors que d’autres y voyaient une référence à la semaine civile. La Cour de cassation a tranché en faveur de cette dernière interprétation, permettant ainsi une plus grande flexibilité dans l’organisation du travail, notamment lors d’événements ou dans des secteurs nécessitant une forte disponibilité sur certains courtes périodes.
Cette décision risque d’impacter considérablement les conditions de travail, en particulier dans des secteurs saisonniers ou à forte activité ponctuelle.
Ce revirement pourrait avantageusement bénéficier à des secteurs comme l’hôtellerie-restauration, l’événementiel ou encore le commerce, où des périodes de forte affluence nécessitent souvent des emplois du temps intensifs. Cependant, cet assouplissement a également suscité des inquiétudes, notamment concernant la santé et la sécurité des salariés. Beaucoup soulignent que travailler sur une période prolongée augmente le risque d’épuisement professionnel, d’accidents du travail ou d’erreurs humaines. Renaud de Kergolay, DRH d’une PME industrielle, alerte sur ce dilemme : “Je pousse l’équipe, je risque un accident du travail. Et si je ne la pousse pas, je perds la commande.”
Face à cette nouvelle réalité, certains experts en ressources humaines appellent à la prudence. Christel Pontié, formatrice spécialisée, insiste : “Un salarié épuisé, même dans le cadre de la légalité, reste un risque psychosocial.” Elle rappelle que la responsabilité ultime incombe à l’employeur, qui doit garantir la sécurité et la santé de ses travailleurs, conformément à l’article L.4121-1 du Code du travail. Néanmoins, la possibilité de travailler jusqu’à 12 jours d’affilée pourrait, si elle est mal maîtrisée, conduire à une fatigue accrue, à une baisse de qualité dans le travail effectué, voire à des normes de sécurité compromis.
Le site officiel du service public précise également qu’une convention collective spécifique peut déroger à cette règle jurisprudentielle, permettant parfois moins de flexibilité, afin de mieux protéger les salariés. En définitive, si cette décision offre une plus grande souplesse pour certains employeurs, elle impose également une vigilance accrue quant au respect des conditions de santé et de sécurité au sein des entreprises. La question reste ouverte : jusqu’où peut-on pousser cette flexibilité sans compromettre le bien-être des salariés ?
