On stagne, on ne prend pas de responsabilité et on reste bloqué au même salaire… Pourquoi en France le manque de perspectives emmure les salariés dans le mal-être au travail

En France, le marché du travail a longtemps été caractérisé par une vision verticale de l’évolution professionnelle, où devenir manager représentait la seule voie de progression. Ce système rigide, souvent critiqué, limite la possibilité pour les salariés de développer de nouvelles compétences ou de trouver un épanouissement dans leur carrière. Selon le baromètre du cabinet Ekilibre, 68% des Français restent globalement satisfaits de leur travail, mais cette satisfaction masque un malaise croissant, marqué par un stress quotidien pour trois-quarts des salariés, une augmentation de l’absentéisme et un sentiment général d’insatisfaction.

Ce mal-être est renforcé par la contestation sociale liée à la réforme des retraites, notamment le passage à 64 ans. Le ministre du Travail, Jean-Pierre Farrandou, s’interroge sur la résistance au travail chez les plus de 60 ans, soulignant que la question de l’âge de départ et des motivations derrière le désir de quitter prématurément le travail reste centrale. Parmi les motifs évoqués, on trouve les conditions de travail difficiles, le stress, la pénibilité, le manque de reconnaissance, mais aussi – et surtout – le manque de perspectives d’évolution pour beaucoup de salariés.

Une des idées clés est que la véritable évolution ne se limite pas à devenir manager, mais inclut aussi la mobilité horizontale, le développement des compétences et l’expertise, pour que chacun puisse s’épanouir à sa manière.

Le constat est clair : l’évolution professionnelle en France a longtemps été perçue uniquement comme une succession de promotions verticales, avec moins d’opportunités pour ceux qui ne souhaitent pas devenir managers. Benoît Serre, co-président du cercle Humania, explique qu‘« il n’y a que 15% des salariés qui aspirent à devenir manager », alors que la majorité recherche la reconnaissance par le développement de compétences et de responsabilités diverses. Développer ces dimensions horizontales permettrait de répondre à la demande croissante d’épanouissement et de satisfaction au travail.

Selon plusieurs experts, cette inertie provient aussi de la manière dont la France a structuré ses parcours professionnels, avec une orientation historique vers des parcours plus rigides, peu favorables à la polyvalence ou à la reconversion. Le potentiel d’augmentation de salaire est par ailleurs en baisse par rapport aux années 80, ce qui contribue à l’impression d’une ascension sociale en panne. L’écart entre le SMIC et les autres niveaux de salaire proche du minimum vital ne cesse de se creuser, renforçant la frustration de ceux qui peinent à sortir de la précarité.

Enfin, au-delà des questions de rémunération, c’est la vision même de l’évolution qui doit évoluer. Certaines personnes, notamment la génération Z, estiment que pour éviter l’ennui et durer dans leur carrière, il faut une pluralité de parcours et de projets. La capacité à apprendre, à se projeter et à définir des objectifs clairs est aujourd’hui essentielle pour maintenir la motivation. La France, pour sortir de cette impasse, doit repenser ses modèles organisationnels et culturels afin d’encourager la mobilité, la reconnaissance des compétences et la valorisation des parcours atypiques, notamment dans la fonction publique où le système rigide freine souvent le développement personnel et professionnel.

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