Depuis plusieurs années, le concept d’entreprise libérée séduit de plus en plus d’organisations en France, parmi lesquelles la société Yemanja, spécialisée dans l’aménagement de bureaux. Ce modèle repose sur une organisation horizontale où les hiérarchies traditionnelles ont disparu, laissant place à une gestion collective et une confiance mutuelle renforcée. La société ne possède plus de chefs, et les réunions formelles ont été quasiment abandonnées, privilégiant une flexibilité totale dans le travail quotidien.
Chaque lundi matin, les 30 salariés de Yemanja se rassemblent pour faire un point collectif sur l’avancement des projets et l’actualité de l’entreprise. En dehors de cette réunion, chacun gère son emploi du temps de manière autonome, souvent en binôme, selon ses préférences. Valentine Giscard d’Estaing, cheffe de projet, témoigne : “C’est assez grisant. On arrive, on se dit ‘je peux faire ce que je veux, c’est génial’.” Cependant, elle insiste également sur l’importance des moments collectifs pour maintenir une cohésion et un cap commun, soulignant que l’adhésion au projet et la solidarité sont essentielles dans cette organisation.
“L’important dans l’entreprise libérée, c’est la confiance, l’autonomie et la capacité à prendre des initiatives sans besoin de hiérarchie. Tout est organisé pour que l’entreprise fonctionne même en l’absence des dirigeants.”
Les décisions se prennent en concertation entre binômes en cas d’incertitude, sans recours automatique à un supérieur hiérarchique. La confiance joue un rôle central, et chaque salarié dispose d’un “droit à l’erreur” qui devient une opportunité d’apprentissage collectif. Par ailleurs, Yemanja offre à ses employés une grande souplesse dans l’organisation de leurs congés, leur permettant de poser autant de jours qu’ils le souhaitent, à condition que cela n’impacte pas le fonctionnement global, offrant ainsi une liberté sans précédent dans la gestion du temps.
Ce modèle s’applique aussi dans les ateliers où une autonomie complète est donnée, comme le raconte Antony Nudes, qui fabrique le mobilier : “On est vraiment indépendant, avec une carte bleue de l’entreprise pour acheter nos matériaux et intervenir chez le client comme des artisans indépendants.” La confiance est si forte que les fondateurs peuvent s’absenter plusieurs mois, comme ce fut le cas lorsque Marie Vaillant et Quentin Audrain ont départés « coupé leurs emails et outils internes pendant trois mois » sans que cela n’impacte le fonctionnement de l’entreprise. Yemanja prouve que, lorsqu’elle est bien pensée, une organisation horizontale peut fonctionner efficacement à long terme.
“Malgré cette organisation étonnante, Yemanja se porte bien financièrement, preuve que le modèle de l’entreprise libérée peut être viable économiquement.”
Ce système n’est pas exempt de difficultés, notamment en matière de recrutement. La confiance est une condition essentielle, ce qui oblige à rechercher des profils qui possèdent autant de soft skills que de compétences techniques. La transparence, la flexibilité et la responsabilisation accrue offrent pourtant de belles perspectives pour une nouvelle façon de concevoir le travail, où chaque employé devient acteur de son organisation et de ses succès.
