Un projet de loi majeur sur le marché du travail, baptisé “employment bill”, est actuellement en discussion au Royaume-Uni, suscitant un vif débat entre les syndicats et le patronat. Ce texte ambitionne d’apporter une amélioration significative des droits des travailleurs, la plus grande depuis une génération, selon le gouvernement travailliste. Parmi ses nombreuses propositions figurent des mesures destinées à renforcer la sécurité des salariés face aux licenciements abusifs et à favoriser des conditions de travail plus équitables.
Le projet prévoit notamment de limiter sévèrement la possibilité pour un employeur de licencier un salarié pour le réembaucher immédiatement avec des conditions moins avantageuses. Il ambitionne également de réduire drastiquement l’usage des contrats “zéro heure”, très courants en Angleterre dans des secteurs comme la restauration rapide, les services sociaux ou la logistique. Ces contrats permettaient jusqu’à présent à l’employeur de ne garantir aucun minimum d’heures de travail, ce qui contribue à l’insécurité de nombreux salariés, notamment ceux travaillant dans des enseignes comme McDonald’s, Burger King ou Domino’s. Plus d’un million de travailleurs seraient concernés par ces mesures dans leur forme actuelle.
Le renforcement des protections pourrait permettre à 1,2 million de salariés d’éviter une insécurité extrême, et faire augmenter le nombre d’emplois stables de plusieurs millions.
Selon une étude relayée par la Work Fondation de l’université de Lancaster, si dès 2023 les licenciements abusifs avaient été interdits, ce nombre d’emplois précaires aurait pu être évité pour de nombreux Britanniques. L’ensemble de la réforme, une fois appliquée, pourrait également faire progresser le nombre de travailleurs ayant un emploi stable de près de 4 millions, atteignant ainsi près de 18 millions. Toutefois, le texte est encore en navette, entre la House of Commons et la House of Lords, où les désaccords persistent. Si un compromis est trouvé, le projet sera rapidement promulgué par le roi, marquant sa mise en application officielle.
Le patronat, quant à lui, s’oppose fortement au projet de loi, le considérant comme une menace pour la croissance économique et l’emploi. La crainte principale concerne l’impact de ces nouvelles protections sur la capacité des entreprises à embaucher dans un contexte économique fragile. Cinq fédérations patronales britanniques ont même joint leurs voix dans une lettre commune pour tenter d’empêcher la promulgation du texte. Elles alertent sur le fait que ces mesures pourraient dissuader les investissements et peser davantage sur des finances publiques déjà sous pression, avec une croissance prévue de seulement 1% cette année et une hausse des dépenses liées à la gestion de la dette.
Malgré un contexte économique morose, le gouvernement de Keir Starmer maintient son cap avec un projet qui comporte notamment des mesures sur le congé parental, la maladie, et les droits syndicaux. Le “employment bill” inclut également la création d’une agence pour le travail équitable, qui aura pour mission de veiller à la bonne application des nouvelles règles du marché du travail. En cas d’adoption par le Parlement, le texte pourrait être promulgué par la monarchie dans les semaines à venir, marquant une étape importante dans la protection des travailleurs britanniques.
