Selon une étude récente de Gartner (2024), plus de 60 % des directeurs des ressources humaines (DRH) en Europe considèrent la gestion des compétences comme leur principal défi stratégique à l’horizon de trois ans. Parallèlement, une autre enquête menée par PwC (2024) montre que 64 % des responsables RH perçoivent l’intelligence artificielle (IA) comme un élément clé pour améliorer la productivité au sein de leurs organisations. Cette dynamique s’inscrit dans un contexte réglementaire de plus en plus exigeant, notamment avec l’IA Act, récemment adopté en 2024 et prévu pour entrer en vigueur en août 2025, qui classe les outils RH utilisant l’IA comme « à haut risque » (Investopedia, 2025).
Les entreprises doivent désormais se conformer à des règles strictes concernant la transparence, l’équité et la conformité des systèmes basés sur l’IA. Ainsi, l’IA ne peut plus être appréhendée comme un simple outil technologique. Lorsqu’elle est intégrée de manière judicieuse, elle devient un levier stratégique pour apporter des réponses aux défis cruciaux rencontrés par les RH, à savoir recruter, fidéliser et développer les talents. Les bénéfices de l’IA se manifestent notamment dans le domaine du recrutement, où son adoption est déjà une réalité pour 37 % des entreprises européennes selon PwC (Workforce Hopes and Fears Survey 2024).
L’intégration de l’IA dans les ressources humaines permet de réconcilier performance et expérience candidat, tout en instaurant un cadre éthique nécessaire.
Les gains mesurables sont concrets : l’adoption d’ATS (systèmes de suivi des candidatures) automatisés permet un gain de temps compris entre 30 et 40 % lors du tri des candidatures (SHRM, 2023), tandis que l’utilisation d’algorithmes prédictifs peut réduire le turnover de 20 % (LinkedIn, Global Recruiting Trends 2023). De plus, 56 % des candidats se déclarent plus satisfaits d’un processus de recrutement où l’IA facilite la communication via des chatbots ou des notifications automatisées (Deloitte, Human Capital Trends 2024). Ces résultats montrent que l’IA a le potentiel non seulement de rationaliser les processus, mais aussi de répondre à l’enjeu central d’améliorer l’attractivité des entreprises.
Néanmoins, réduire l’IA à un simple outil d’efficacité serait une erreur. Après avoir démontré son efficacité dans le recrutement, l’IA ouvre la voie à une transformation plus profonde du rôle des RH. D’après le McKinsey Global Institute, d’ici 2030, 375 millions de travailleurs seront amenés à acquérir de nouvelles compétences liées à l’automatisation et à l’IA. Les organisations qui exploitent l’IA pour la gestion des carrières notent une augmentation de 15 % de l’engagement des collaborateurs (Gartner). De plus, grâce à l’IA, la personnalisation des parcours de formation devient plus accessible, optimisant ainsi les dispositifs d’apprentissage, comme le note Nibelis dans son article « L’intelligence artificielle : un levier pour réinventer la formation ».
Enfin, l’IA Act introduit des mesures visant à garantir une utilisation éthique et responsable de l’IA dans les ressources humaines. En classant les systèmes RH fondés sur l’IA comme « à haut risque », cette réglementation impose une transparence vis-à-vis des collaborateurs, ainsi que des audits réguliers pour prévenir les biais discriminatoires. Ce cadre, loin de freiner l’innovation, représente une opportunité stratégique pour instaurer la confiance, renforcer la gouvernance des ressources humaines et légitimer durablement l’usage de l’IA. Ainsi, l’IA dépasse son rôle d’outil d’automatisation pour devenir un levier stratégique capable de concilier performance et éthique dans la gestion des talents.