Au début du mois de novembre, l’Assemblée nationale avait majoritairement rejeté la proposition visant à rétablir la cotisation salariale pour les apprentis. Cependant, lors de l’examen du budget de la Sécurité sociale, le Sénat a pris une décision contraire en votant en faveur du maintien de cette mesure controversée. Par 175 voix contre 121, la chambre haute a choisi d’imposer aux apprentis le paiement des cotisations, malgré l’opposition ferme de la gauche et de certains membres centristes du gouvernement. Ce vote marque une étape clé dans un débat qui demeure ouvert, puisque l’ensemble du processus législatif doit encore être finalisé entre les deux assemblées jusqu’au début décembre.
La proposition du gouvernement, portée par le ministère de Sébastien Lecornu, visait à supprimer l’exonération de cotisations salariales pour les contrats d’apprentissage à partir du 1er janvier 2026. Une exclusion qui ne concernerait pas les contrats déjà en cours, mais qui aurait, de fait, réduit le salaire net des apprentis. La disposition prévoit que la partie de la rémunération supérieure à 50 % du SMIC ne serait plus exonérée, ce qui contribuait déjà cette année à une diminution du salaire net pour certains apprenti.e.s. La majorité de l’Assemblée nationale s’était prononcée contre cette réforme, mais le Sénat a finalement rétabli cette exonération, relançant ainsi le débat sur un sujet sensible concernant la justice sociale et l’attractivité de l’apprentissage.
Le Sénat justifie cette décision par la nécessité d’accroître les recettes pour la Sécurité sociale, estimant que cette mesure pourrait en rapporter jusqu’à 1,2 milliard d’euros en 2027, tout en affirmant qu’elle ne constitue pas une véritable incitation à développer l’apprentissage.
Les représentants du gouvernement, notamment la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, défendent cette mesure en soulignant qu’elle « recreait une forme de justice » en alignant la situation des apprentis avec celle des autres salariés, qui ne sont pas soumis à la même exonération en fonction de leur salaire brut. Selon eux, cette réforme permettrait de dégager environ 320 millions d’euros pour la Sécurité sociale dès 2026, un argument qui n’a pas convaincu tous les acteurs politiques. La gauche, minoritaire dans ce débat, a vivement critiqué cette décision, notamment la députée Céline Brulin, qui a dénoncé « un choix politique assez affreux pour les plus modestes ».
Par ailleurs, même au sein du groupe macroniste, cette réintégration a suscité des frustrations, comme l’a indiqué le député Martin Lévrier : « C’est hallucinant. On nous dit qu’on doit faire des économies et, pourtant, on récolte 1,2 milliard d’euros sur le dos des jeunes. » Frédérique Puissat (LR) a rappelé la raison d’être de la réforme en affirmant que « tout le monde est favorable à l’apprentissage », mais que l’objectif principal reste de réduire le déficit de la Sécurité sociale. La bataille législative est donc loin d’être terminée, mais cette décision illustre la difficulté à concilier justice sociale et enjeux budgétaires dans le paysage politique français.
